ActualitésCôte-d’Or : un château médiéval, un revenant et une question à 13 millions d’euros devant le tribunal de Nancy

6 novembre 2022

Un Ukrainien ressuscité et 13 millions d’euros réclamés par une société internationale de courtage d’engrais. C’est l’affaire rocambolesque du château de la Rochepot, en Côte-d’Or. Six personnes sont accusées de près ou de loin de blanchiment d’argent. Le procès s’ouvre ce lundi 7 novembre à Nancy.

Ce lundi 7 novembre, six personnes sont appelées à la barre du tribunal de Nancy pour s’expliquer sur les conditions de rachat de ce magnifique château du XIIe siècle aux toits vernissés. Donjons, murailles, pont levis, douves et fortifications. La carte postale est digne des images de nos livres de contes de fées, mais, depuis octobre 2018, l’histoire tient plutôt d’une intrigue à la James Bond.

Le Château de la Rochepot, construit au XII° siècle et remanié au XIX° © Radio France – Olivier Estran


« La parole à un « mort-vivant » »

Le château est actuellement mis sous séquestre, car son propriétaire présumé, un homme d’affaires ukrainien est accusé d’avoir détourné 13 millions d’euros dans son pays et d’avoir blanchi une partie de cette somme en achetant ce monument historique au sud de la Côte -d’Or. Auparavant, il a organisé sa disparition en se faisant passer pour mort dans son pays. « C’est la première fois que j’interviens dans un dossier où l’on va donner la parole à un mort-vivant » souligne Maître Jean-Philippe Morel, un des nombreux avocats attendus à cette audience

Dmitri Malinovsky a 40 ans et il comparait libre. Pour certains, c’est en effet un revenant, car il est déclaré mort dans son pays, en Ukraine. Il aurait été victime d’un accident de la route le 25 octobre 2014 et son acte de décès a été enregistré le 14 juillet 2015. Pourtant, en avril 2015, il obtient 13 millions d’euros de la part d’une société internationale de négoce d’engrais. « Une escroquerie » affirme maitre Charlotte Plantin, l’avocate de la société Dreymoor, qui espère bien récupérer cet argent. Cette grosse somme aurait servi à mener grande vie, notamment avec le rachat du château de la Rochepot. « Il y a eu des achats de montre de luxe, de belles voitures, on a retrouvé la trace d’un million d’euros sur des comptes offshore » précise maître Plantin.

« Interpellé après des travaux impayés

Lors d’une première audience avortée en février dernier pour vice de procédure par le tribunal de Nancy, Dmitri Malinovsky a eu le temps d’affirmer qu’il serait victime de « manipulations » dans cette affaire, et qu’il est en mesure de prouver l’origine licite de sa fortune. Il est vrai que le châtelain ne s’est jamais caché : son fabuleux monument historique était ouvert aux touristes et aux séminaires. Mais, en 2018 des artisans locaux se plaignent de nombreux impayés. La gendarmerie s’intéresse alors au propriétaire qui est identifié et interpellé. Lui assure n’avoir rien à se reprocher. Il devra le prouver, aux côtés de sa compagne, de son ex-épouse et d’une avocate, accusées d’être ses complices dans cette affaire de blanchiment d’argent.

« Un château qui se dégrade

La commune de la Rochepot n’intervient pas dans ce dossier. Elle ne peut pas être partie civile, mais la commune déplore le manque de retombées touristiques depuis que cette affaire a éclaté. Jean-Philippe Morel, avocat au barreau de Dijon, défend Alexandru A. un ressortissant moldave, embauché comme gestionnaire touristique du château. « Mon client assure avoir été berné » affirme l’avocat. « En aucun cas, il n’a eu conscience que ce château aurait pu servir à une opération de blanchiment de fonds. Il a organisé, à la demande du propriétaire, des activités touristiques dans ce domaine. Par exemple, des étudiants venaient célébrer leur stage d’intégration. Il est aujourd’hui accusé de complicité, mais s’en défend. »

Dans l’attente du dénouement de cette affaire, le château -dont l’emplacement est signalé par des panneaux sur l’autoroute A6- est fermé au public. Plus personne n’y pénètre. En octobre 2021, une association d’habitants s’est mobilisée pour sauver une partie des meubles mis alors aux enchères.

À la Rochepot et aux environs, bon nombre de personnes s’inquiètent d’un bâtiment qui se dégrade, livré aux intempéries et aux herbes folles. « Ce n’est qu’une page dans sa longue histoire » tempère maitre Jean-Philippe Morel. « Cette bâtisse va nous survivre et, dans 50 ans, on peut imaginer que les guides le feront visiter en racontant l’histoire de ce propriétaire ukrainien, disparu dans son pays et ressuscité en Bourgogne. »

En attendant, les principaux débats de ce procès hors-normes et sa conclusion seront à suivre dans les éditons de France Bleu.

Article Paru dans www.francebleu.fr le dimanche 06 novembre 2022

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